Mon pote le robot

Ce texte est une reprise de l’article http://binaire.blog.lemonde.fr/2014/06/11/decouverte-de-la-robotique-a-lecole-primaire-quand-la-recherche-se-met-au-service-de-leducation/

Mon pote le robot


Parlons de la découverte de la robotique à l’école primaire, quand la recherche se met au service de l’éducation. Didier Roy est professeur de mathématiques et enseigne les sciences du numérique. Accueilli comme chercheur en optimisation et personnalisation des apprentissages au sein d’une équipe de recherche en robotique d’Inria Bordeaux Sud-Ouest, Flowers, son travail* fait de la robotique un outil d’éveil scientifique.
Entrez avec nous dans la salle de classe.
Nous sommes un mardi. Il est 15h45. Cet après-midi de printemps est radieux. Il doit être génial de jouer dehors. Pourtant, Lola, Safina et Oscar n’ont pas l’intention de sortir tout de suite de la salle de classe.
Posé sur la table devant eux, un étrange objet** fait d’étranges choses. Il avance, tourne à gauche, à droite, recule, jette des éclairs de lumière verte, bleue ou rouge, émet des petits sons graves ou aigus, court ou longs.
« C’est n’importe quoi », pense Oscar. Quarante secondes plus tard, il se demande s’il n’y a pas quelque chose à comprendre là-dedans. D’accord, mais quoi ? Au bout de 10 minutes, la petite équipe perce une première épaisseur de mystère : en appuyant sur les boutons on peut changer ce que fait le machin sur la table, on peut choisir son comportement. Quand il émet une couleur verte, il a aussi tendance à suivre un objet qui est devant lui, à être « amical ». « D’accord pour amical. On pourrait même dire collant ! » remarque Safina. Quand la couleur est rouge, impossible de l’approcher, il fuit sans arrêt. Ça doit être le mode « trouillard » dit Lola en rigolant.
Pour le comportement bleu, c’est plus compliqué. On a beau avoir 8 ans, on ne sait pas tout.
— Peut-être qu’il faut lui chanter quelque chose ? avance Safina.
— Ou lui dire un mot spécial, ou lui tirer la langue ! répond Oscar en faisant des gestes. Comment on peut savoir ?
— Ben, en réfléchissant et en essayant, à mon avis. Faisons une liste de ce qu’on pense, dit Lola.
Les voilà d’accord. Une liste des catégories de choses à tester est commencée. La méthode prend forme, ils commencent à tester des mots, puis des gestes, mais le champ des possibilités est tellement vaste… Ils
cherchent d’autres pistes, si possible offrant moins d’aléatoire. Il leur semble avoir (presque) tout essayé quand Safina se rappelle qu’on leur a aussi donné des trucs en même temps que le machin. Des cubes, des petites quilles et une feuille avec une espèce de circuit tracé en noir. Elle pose le robot sur le circuit. Et là, devant leurs yeux écarquillés, le machin se met à suivre la ligne noire en se balançant tout au long, comme un chien qui suit une piste le museau collé au sol. « Trop fort, le machin ! »
Il faut maintenant franchir le deuxième cercle de mystère. Comment fonctionnent les comportements ? Par exemple, l’« amical ». Les enfants tombent d’accord en moins de deux minutes. Sur le devant du machin se trouvent comme de toutes petites fenêtres, qui détectent s’il y a un objet. S’il y en a un, il avance, s’il n’y a en a pas, il ne fait rien.
Ça marche avec toutes les fenêtres ou pas ? Avec des objets différents ? Afin d’en savoir plus, on discute et s’accorde sur une série de tests à faire, un seul doigt devant une seule fenêtre, deux doigts devant deux fenêtres… À l’issue de l’expérience, c’est clair : n’importe quel nombre de n’importe quels objets devant n’importe quel nombre de n’importe quelles fenêtres fait avancer le robot !
— Je le savais depuis le début, fanfaronne Oscar.
— Peut-être bien que t’es trop fort mais là au moins on en est sûr que ça marche comme ça, lui rétorque Safina, légèrement agacée.
Trois quarts d’heure plus tard, après avoir réalisé les autres activités données par l’animateur, Lola, Safina et Oscar rentrent chez eux avec des choses nouvelles à raconter à la maison. On leur a donné un machin dont ils ont essayé de comprendre le fonctionnement. Pour eux, c’est maintenant clair : dans le machin, il y a des capteurs qui permettent de détecter des choses, un petit ordinateur pour décider quoi en faire et des actionneurs pour faire ce qui a été décidé : rouler, tourner, faire de la lumière, faire du bruit.
Ah ! Le machin ? il s’appelle un « robot ». Et son petit nom est Thymio 2.
— Moi, quand je serai grande, je veux être roboticienne, c’est sûr ! lance Lola à ses parents, surpris de cet intérêt soudain pour les sciences.
Vivement mardi prochain : on va apprendre à faire des programmes pour le robot !

(**) Le thymio-2, créé par l’EPFL, est un formidable robot pour l’éducation (en savoir plus).